Un professionnel du piratage de cartes bancaires parle – P.2

Interview d’un professionnel du piratage de cartes bancaires. Pour lui, il n’y a pas d’argent facile, il n’y a que de l’argent rapide. Partie 2.

Il se fait appeler Route 21. Cet internaute d’une trentaine d’année officie dans le monde de l’illégal depuis plus de 10 ans. Cet amateur de rap américain (et le bling bling qui va avec) s’est spécialisé dans le piratage de cartes bancaires. Un business qu’il explique d’une façon peu courante dans ce milieu. Pour ce Russe, il n’y a pas d’argent facile, il n’y a que de l’argent rapide. Philosophe 2.0, amateur d’art (il affiche souvent des œuvres de l’artiste russe Ivan Koulikov), ce malveillant a ouvert une boutique qui commercialise des milliers de données bancaires piratées. Il l’affirme, 95% proviennent de cyberattaques de type phishing (hameçonnage). Cette interview n’a pas pour mission de vanter les actions de ce criminel, mais de comprendre comment ce milieu et ces pirates évoluent avec le temps, les techniques et les lois. Retrouver la partie 1 ici.

Quels sont vos principes de base du travail d’équipe pour que le chaos ne se produise pas et que tout soit sous le contrôle du leader ?

Afin d’éviter le chaos, il est nécessaire de construire un système centralisé, avec une hiérarchie claire. Le sentiment d’incertitude provoque la peur chez les gens, l’efficacité diminue, les affaires stagnent. Donnez aux gens les faits et faites confiance au produit et ils vous suivront. Sans un tel squelette, vous pouvez vous-même vous perdre dans une liste interminable de tâches et de messages.

Ensuite, la mise à l’échelle n’est pas possible sans une division du travail. Utilisez les forces de vos employés et répartissez correctement les tâches. Sélection du personnel pour l’efficacité, la compétence. Et n’oubliez pas de rester une équipe, les intérêts personnels ne doivent pas être placés au-dessus des intérêts de l’entreprise.

Enfin, écouter les problèmes et les sentiments de vos équipes. Établissez une communication à un niveau de confiance et de respect. Récompensez-les pour leur bon travail, libérez leur potentiel et inspirez-les à faire de très grosses conneries. C’est ce que nous faisons ici et ce qui nous rend vraiment riche.

Quelles sont vos idées sur la situation actuelle dans le monde, cela affecte-t-il grandement vos activités/travail ?

Je pense que nous vivons une époque très intéressante, on pourrait dire un tournant. Mais si vous posez des questions sur la géopolitique, la guerre et ce qui se passe maintenant. Je l’accepte simplement. Tout vient de notre ego. L’impérialisme, s’opposer au monde entier. Quelqu’un pourrait penser que nous ne parlons que de la Russie, mais en Amérique, c’est absolument la même chose.

Vous dites avoir besoin d’assurer votre sécurité et celle de votre progéniture. Sécurité dans quel sens, richesse matérielle ou menace pour la vie ?

J’ai vu beaucoup de merde, j’étais entouré d’un monde plutôt hostile. Maladie, pauvreté, crime organisé. C’est plus de la douleur que de la romance. Mes parents n’ont pas réussi à me protéger, ce qui est l’un des besoins fondamentaux d’un enfant. Cela m’a endurci, a fait de moi ce que je suis et j’ai appris très tôt à faire face aux difficultés, à ne jamais abandonner. Mais je veux que ma famille ait le choix, afin que j’éveille chez les enfants un intérêt pour ce monde, afin qu’ils n’aient pas à survivre. C’est curieux que j’y aille moi-même en prenant constamment des risques.

Revenons à la question de votre activité, pouvez-vous éclairer nos abonnés concernant les méthodes d’extraction de matière ?

En ce qui concerne l’extraction de matière [piratage de données bancaires, NDR] – c’est tout un art. Combien de types d’activités j’ai essayé dans le noir, assez pour un livre et une adaptation cinématographique. La question est très large et il faut comprendre que ce n’est pas dans mon intérêt de m’engager dans une réponse complète. Lorsque j’ai ouvert ma boutique pour la première fois, le marché était composé à 95 % de faux comptes bancaires. Vous avez besoin d’un logiciel et c’est le plus gros problème en ce moment. Les banques et tous les grands services financiers ont une poche très profonde et la part du lion de leurs coûts est la protection contre divers types de cybermenaces.

C’est pourquoi les logiciels écrits en python, c+ et c# ont toujours été plus appréciés. Parce que le codeur lui-même définit la logique d’un tel logiciel et qu’il peut être écrit de n’importe quelle manière. C’est sa propre danse avec des zéros et des uns. De tels logiciels durent plus longtemps et il est plus difficile pour les banques de s’en protéger.

Ce sont les comptes de phishing qui représentent aujourd’hui 95 % de son business

Les défenses les plus difficiles à contourner sont celles qui utilisent la génération de jetons. Pour que le logiciel fonctionne, il doit envoyer une requête au site Web de la banque qui contient ce jeton généré. Même alors, la rentabilité de l’écriture de tels logiciels était remise en question, car un tel logiciel pouvait coûter de 1k à 15k dollars, et la banque pouvait changer les algorithmes le lendemain de l’achat du logiciel pirate, alors que vous êtes encore loin de la récupération de données bancaires. Mais ce n’est pas le seul facteur de risque. Par exemple, tout le monde n’a pas accès à des codeurs capable de contourner des protections sérieuses et maintenir le logiciel en état de marche. Et pour savoir pour quelle banque commander un logiciel, vous devez être profondément immergé dans le marché. La vitesse de travail dépend du logiciel lui-même et des proxys que vous utilisez. Les proxys se sont montrés les meilleurs. 30 Go d’utilisation de proxies peuvent coûter 1 à 5 000 $ et s’envoler en 1 à 2 jours. Pour un profit maximum, vous avez besoin d’affûtage. Une petite particularité pour améliorer la qualité : Vous achetez une base de données pirates d’un million de lignes pour 200 à 300 $, vous allez obtenir 8 à 10 000 données piratées commercialisables. Vous assemblez votre base à partir d’autres données. On appelle cela l’affûtage. Et si vous collectez la base de données bancaires piratées à d’autres banques, le profit augmente considérablement. Mais tout cela représente beaucoup d’argent et beaucoup de travail. Pour une marge forte, je prends beaucoup de risques, je dépense beaucoup d’argent dans des tests, mais quand tout fonctionne, vous prenez tous les bénéfices pour vous. Pour moi, c’est la chose la plus attirante. Des facteurs qui nous poussent, depuis plusieurs années, à extraire des comptes via des attaques phishing. La capacité de faire presque n’importe quelle banque est très attirant. Cela représente désormais 95% de l’assortiment de ma boutique.

Comment voyez-vous vos activités du côté de la loi ?

Il y a eu plusieurs histoires où j’ai marché le long du tranchant d’un couteau et, d’une manière ou d’une autre, j’en suis sorti miraculeusement. En général, j’aime ce style de vie. Le crime est dans mes gènes. Je peux faire passer de la contrebande dans un avion pour m’amuser et bien la cacher pour ne pas oublier qui je suis. Mais je suis conscient des risques et, me semble-t-il, j’en accepte les conséquences. Mais je ne vais pas m’engager tout ma vie dans ma boutique. Bien que, en tant que passe-temps, ce sera probablement avec moi pour toujours.

Considérez-vous votre type d’activité comme utile à la société, comment considérez-vous vos actions d’un point de vue moral ?

Je me vois comme un petit ruisseau, et l’eau, comme vous le savez, use une pierre. Je n’aime pas la façon dont les américains se comportent dans l’arène géopolitique. Je n’ai rien contre les gens ordinaires, mais la rhétorique de leur pouvoir. Menaces, guerres et contrôle total sur le secteur financier, bases militaires à travers le monde. Ils ne veulent pas négocier obstinément, mais le cachent derrière de la manipulation. Ils se considèrent meilleurs que les autres. Je pense qu’ils ont merdé. Que l’alternative soit douteuse et l’avenir vague. Si on tue leur économie et le dollar, il y a de fortes chances que la Chine vienne les remplacer. Cela semble risqué, mais traire cette vache, face au secteur bancaire américain, et en même temps aider le moindre mal dans un changement de paradigme est mon choix. Remplir mes poches de papier et plier les grandes entreprises, c’est ce que je peux faire. Et j’en suis fier. Et pour le bénéfice. Vous pouvez investir dans la science et les affaires, améliorer l’environnement et vous engager dans l’éducation. Aidez les animaux et les enfants sans abri. Beaucoup de voleurs avec qui je communique sont beaucoup plus honnêtes et décents que n’importe quel banquier.

Partie 1.