Vaste coup de filet contre les arnaques aux fausses convocations judiciaires : 19 interpellations et un préjudice estimé à plus de 3,3 millions d’euros.

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Suite à une coopération étroite entre la police, la gendarmerie et Europol, 19 individus ont été arrêtés dans le cadre d’un réseau d’arnaques utilisant des fausses convocations judiciaires. Les victimes étaient accusées à tort de consultation de contenu pédopornographique, subissant ainsi des amendes fictives. Le préjudice s’élève à plus de 3,5 millions d’euros.

Une vaste opération a été démantelée par les autorités, révèle RTL. Grâce à une collaboration étroite entre la police (SDLC), la gendarmerie et Europol, 19 individus ont été appréhendés cette semaine dans le cadre de plusieurs réseaux d’arnaques. Ces réseaux ciblaient les destinataires de courriels frauduleux, les accusant faussement de consulter du contenu pédopornographique et les incitant à payer des amendes fictives. Certains ont cédé à ces demandes. Les escrocs auraient réussi à voler plus de 3,3 millions d’euros.

Il est fort probable que vous ayez déjà reçu l’un de ces courriels d’arnaque, envoyés à des centaines de milliers de personnes en France. ZATAZ vous parlait déjà de cette arnaque en 2016. Ces courriels se présentent sous la forme de convocations judiciaires, comportant le logo de la police ou de la gendarmerie, et sont même signés par de véritables officiers de haut rang ainsi que par des magistrats en exercice. D’autres versions annonçaient aussi l’infiltration de votre ordinateur.

Tout cela n’est bien sûr qu’une supercherie, usurpant l’identité de fonctionnaires éminents dans le but de vous faire payer une amende fictive, avec la promesse que les poursuites seront abandonnées. Pendant deux ans, les enquêteurs de l’Office central de lutte contre la cybercriminalité (OCLCTIC) et les gendarmes des sections de recherches de Versailles, de la Brigade de recherches de Nice et du CyberGend ont mené des investigations qui ont abouti à l’interpellation des 19 individus dans la semaine du 23 juin.

Menace avec compte à rebours pour inciter la victime à payer.

Escrocs en France et en Belgique

Ces individus formaient de petites équipes partageant le même mode opératoire. Ils ont été arrêtés en France et en Belgique pour leur implication dans le blanchiment de l’argent provenant de ces arnaques. Leur période de garde à vue s’est terminée le jeudi 22 juin, et ils ont été convoqués pour des audiences qui auront lieu plus tard dans l’année. Ils encourent jusqu’à 10 ans de prison.

Au total, les autorités ont enregistré plus de 150 000 signalements sur la plateforme Pharos et plus de 300 dépôts de plaintes. Les enquêteurs ont réussi à retrouver l’identité de ces intermédiaires grâce aux courriels reçus par les victimes, ainsi qu’aux coordonnées bancaires fournies pour le paiement des amendes fictives. « Nous devions déterminer s’il s’agissait d’un seul et même réseau organisé ou de petites équipes partageant le même mode opératoire. Finalement, la deuxième hypothèse s’est révélée être la bonne« , a expliqué le commissaire Christophe Durand, chef adjoint de l’OCLCTIC.

Interpol

Faux site Interpol.

Cette arnaque s’est propagée dans toute l’Europe et suit souvent un schéma similaire. Ceux qui envoient les courriels résident en Afrique, notamment en Côte d’Ivoire. Avec l’aide de complices vivant dans des pays européens, ils ouvrent des comptes bancaires pour blanchir l’argent, avant de redistribuer une partie des sommes à ceux qui rédigent ces courriels. « Ces courriels sont envoyés à un large éventail de destinataires, utilisant la technique du chalutage : ils lancent un filet et voient ce qu’ils peuvent attraper. En France, pratiquement tout le monde a pu être potentiellement victime de ces spams. Dans 90% des cas, les destinataires suppriment simplement le courriel, mais malheureusement, d’autres tombent dans le piège et acceptent de payer les amendes fictives« , détaille le colonel de gendarmerie Thomas Andreu, chef de la section de recherche de Versailles. ZATAZ vous avez expliqué que certains de ces arnaqueurs n’hésitaient plus à créer de faux sites aux couleurs de la police, de la gendarmerie. ou encore du service Interpol. Je vous montrais, en février 2023, comment des dizaines de faux noms de domaines police et/ou gendarmerie avaient été enregistrés par des escrocs.

Après deux années d’enquête, les pertes minimales estimées dépassent les 3,3 millions d’euros. Ce chiffre est susceptible d’être beaucoup plus élevé si l’on prend en compte les victimes qui n’ont pas porté plainte. Les montants réclamés aux victimes varient de 1 400 euros à plusieurs centaines de milliers d’euros. Cependant, en général, les escrocs évitent de demander plus de 5 000 euros afin de ne pas éveiller les soupçons des banques, précise le colonel Thomas Andreu. Si les dommages financiers sont colossaux, les préjudices humains sont encore plus graves. En conséquence de ces arnaques, six enquêtes ont été ouvertes suite au suicide de personnes victimes. Les victimes se retrouvent souvent isolées, démunies et parfois jugées par leur entourage lorsqu’elles décident d’en parler. Le commissaire Christophe Durand explique : « Nous avons affaire à des victimes âgées de plus de 60 ans pour qui la technologie reste difficile à appréhender. Ces personnes confondent parfois des contenus érotiques, pornographiques avec ceux relevant de la pédocriminalité. Ajoutez à cela le fort impact émotionnel de recevoir un courriel portant le logo de la police, de la gendarmerie ou d’Europol, c’est la panique totale« .

Parmi ces victimes, un homme s’est suicidé après avoir été victime d’une double extorsion. Après un premier paiement de 5 978 euros, les escrocs lui ont demandé de verser à nouveau la somme de 7 480 euros. Se sentant impuissant et piégé, il a décidé de mettre fin à ses jours. Il est important de souligner que le parquet de Paris rappelle qu’il n’est nullement établi que ces personnes aient réellement consulté du contenu pédopornographique. Ces individus se sentent souvent perdus face à des accusations aussi graves. Les autorités précisent qu’une convocation judiciaire ne sera jamais envoyée par courrier électronique, et encore moins accompagnée d’une demande de paiement d’une amende en échange de l’abandon des poursuites. (RTL)

Au sujet de l'auteur
Damien Bancal - Fondateur de ZATAZ.COM / DataSecurityBreach.fr Travaille sur les sujets High-tech/Cybercriminalité/Cybersécurité depuis 1989. Gendarme réserviste - Lieutenant-Colonel (RC) ComCyberGend. Fondateur du Service Veille ZATAZ : https://www.veillezataz.com En savoir plus : https://www.damienbancal.fr

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